Merci, au revoir.
C’est vraiment agréable. Un simple texto de type « Salut on peut se voir », et la machine est lancée. La belle mécanique, huilée et efficace, se met en branle. Quelques minutes plus tard, le message de confirmation arrive : « Ué dispo envoie adresse + code + tu veux koi ». Parfait. Tout se passe bien. Vous pouvez désormais vous détendre et attendre votre livraison en tout sérénité. Un coursier anonyme, et pressé comme il se doit, passera bientôt à votre domicile vous délivrer le produit avant de s’éclipser avec élégance. La propreté et la vitesse de la transaction sont un vrai plaisir pour quiconque a du s’approvisionner en substances illicites ces dernières années. Et qui donc connaît la grande tristesse de devoir aller faire la queue à la cité -les fameux fours- ou de devoir recevoir chez soi un triste individu. Car fut une époque, pas si lointaine, où on était déjà bien content d’avoir un dealer fiable, même si cela incluait de devoir passer du temps avec lui à écouter ses conneries et à faire semblant de l’apprécier pour être mieux servi. En fonction de son degré de délinquance, côtoyer la personne pouvait être générateur d’une certaine fatigue nerveuse. Fini, tout ça. Désormais, les gars ont amorcé le virage de l’uberisation avec une souplesse et un professionnalisme qui font plaisir à voir. On ne s’adresse plus à la personne qui délivre le produit, réduite au rang de simple coursier (d’ailleurs ce sont même parfois des mecs habillés en Deliveroo), mais à un opérateur qui gère tout ça à distance, avec sérieux et diplomatie. Désireux de fidéliser le client, c’est lui qui envoie les fameux messages promotionnels façon : PROMO CARO DES ANTILLES ET MARIE-DENISE PESÉ 1G + MARRON ET VERTE OP AUSSI 50 MINIMUM OPÉ 7/7. Certains vont même jusqu’à offrir des clopes, d’autres un pochon offert pour 5 achetés, ou autres petites attentions mignonnes dont on n’aurait pas soupçonné capables ce type de milieu, généralement assez rustre . Mais, soumis à un concurrence bien plus accrue car moins dépendante des contraintes géographiques, les gars sont obligés de faire parler la fibre commerciale. C’est génial. Petits inconvénient néanmoins à ce nouveau système : pour les amateurs de drogues douces aux poches trouées, c’est souvent 50 euros minimum. Pas de 20 balles ou de 10 balles qui dépannaient pour la soirée ou le week-end. Et c’est vrai que ça peut être long. Quand le logisticien t’annonce « il voit 3 personnes et c’est toi », tu sais que tu as quelques heures à tuer. Par contre, bel avantage, la quantité est standardisée. Ça ne bouge pas, aucune différence entre les pochons. Fini les dosages à la gueule du client. Essayez de demander au livreur de vous en donner un bien servi, il vous répondra d’un laconique et rassurant: « Sont tous pareil, frère ». Et de vous en laisser comparer 2 pour prouver ses dires. La transparence, encore une qualité directement héritée de la start up nation. Qui aurait finalement trouvé ses meilleurs disciples là où elle ne les attendait pas, loin des wannabee entrepreneurs d’écoles de commerce en doudoune sans manche qui plantent des sociétés aussi vite qu’ils changent d’idée du siècle ? 
Allez, bonne chance.
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